Présentation du Pygargue

Un oiseau hors du commun

Présentation

« Le Pygargue à queue blanche est l’un des plus grands rapaces diurnes d’Europe. La longueur totale de l’oiseau adulte est de 70-100 cm, pour une envergure de 190-250 cm. Son poids varie d’environ 4 kg pour le mâle jusqu’à 6 kg pour la femelle. Le plumage des adultes est brun sauf la tête et le cou qui sont plus clairs. Les ailes sont longues et rectangulaires, leurs extrémités atteignent le bout de la queue. La tête est large, le cou est puissant et le bec fort est entièrement jaune. La queue courte et cunéiforme est entièrement blanche. Les pattes sont jaunes. Hormis cette différence de taille et de poids, le dimorphisme sexuel est peu marqué (Ferguson-Lees, Christie, Franklin, Mead, & Burton, 2001). Une mue complète s’effectue sur plusieurs années, elle a lieu principalement entre avril et octobre.

Les Pygargues, spécialisés dans la capture de poissons, disposent de tarses dénudés aux deux tiers, de soles plantaires couvertes de spicules rigides, de doigts plutôt courts et de serres très arquées leur permettant la capture et le maintien des poissons de forte taille (Orabi P, 2012). Les juvéniles sont plus sombres, notamment à la tête, et présentent un manteau variablement moucheté de clair. La queue est en grande partie sombre, le bec est noir et l’iris assez sombre. Chez les subadultes, la queue présente une bande terminale foncée, avant de blanchir. Cinq à six plumages peuvent être distingués chez cette espèce. La détermination de l’âge est possible jusqu’au 4ème plumage inclus, sachant qu’il existe des variations individuelles de plumage entre deux oiseaux du même âge qui peut conduire à une estimation de l’âge erronée (LOANA (Lorraine Association Nature) a édité en 2016 un guide d’aide à l’identification des différents plumages du Pygargue à queue blanche dans le cadre du Plan régional d’actions 2015-2020 sur les Aigles pêcheurs en Lorraine ).

Pygargue à queue blanche mâle adulte en plein vol en pleine nature sur le fond il y a des de rochers.
Pygargue à queue blanche mâle adulte. Crédit photo Les Aigles du Léman
Portrait du profil gauche d'un pygargue à queue blanche juvénile. Sa tête est tourné vers le côté droit. Le bec gris est noir, la tête sombre, de la même couleur brun-foncé que le reste du plumage.
Pygargue à queue blanche juvénile. Crédit photo Les Aigles du Léman.

Physiologie

Voici ce que dit le Plan National d’Action pour le pygargue :

« C’est à partir de l’âge de 5 ou 6 ans que le Pygargue commence à se reproduire mais des observations de reproduction de subadultes ont déjà été faites pour des couples formés avant l’âge moyen de la maturité sexuelle des individus. Le Pygargue à queue blanche installe son nid préférentiellement sur des arbres de haut port (arbres d’une hauteur le plus souvent supérieure à 10 m à feuilles caduques ou sur les conifères), généralement dans le tiers supérieur de l’arbre, mais peut aussi construire son nid sur des parois rocheuses escarpées, plus rarement au sol. Le nid est constitué de grosses branches mortes, garni de mousses, lichens, herbes sèches, etc. Les aires de nidification sont rares sur des infrastructures comme les pylônes électriques ou les tours.

Le Pygargue recharge son nid chaque année dès la fin de l’hiver, le mâle apportant la plupart des matériaux tandis que la femelle arrange le nid. L’apport de végétaux frais se poursuit pendant la saison de reproduction. Le Pygargue peut disposer de plusieurs aires sur son territoire de reproduction. La ponte a lieu de fin janvier à fin avril, selon la latitude et le climat. La femelle pond 1 à 3 œufs, en général 2, couvés à tour de rôle par les deux adultes pendant 35 à 38 jours environ. A l’éclosion, les poussins pèsent 80-95 g pour atteindre 4-6 kg avant l’envol, soit 6 à 8 semaines. L’envol des jeunes se produit entre 2 mois et demi et 3 mois après l’éclosion. Après l’envol, ils sont encore nourris par les adultes pendant 4 à 5 semaines, puis ils se dispersent progressivement sur le territoire parental au cours du troisième mois. Les jeunes atteignent la maturité sexuelle vers l’âge de 5 ans. Dans les populations en bonne santé, le succès reproducteur atteint 60 à 80% et le nombre de jeunes à l’envol est de 1.5 (en Allemagne, entre 1991 et 2005) (Sulawa, Robert, Köppen, Hauff & Krone, 2010). »

Pygargue à queue blanche juvénile. Crédit photo Les Aigles du Léman.

Le nid. Crédit photo Rémi Chapeaublanc.

Régime alimentaire

« Le Pygargue à queue blanche a un régime alimentaire assez varié, en fonction des ressources locales et de la saison : il se nourrit principalement de poissons morts ou vivants qu’il pêche, et capture également des oiseaux d’eau (canards, foulques, grèbes, mouettes, etc.) et des mammifères. C’est un opportuniste qui se nourrit parfois de charognes, en particulier en hiver. Il n’hésite pas non plus à subtiliser leur nourriture à d’autres oiseaux (Balbuzard pêcheur, goélands et cormorans) ou à des mammifères (Loutre). Le Pygargue recherche sa nourriture principalement à proximité de l’aire (4-7 km) mais le rayon d’action du couple peut atteindre 15 à 30 km (Patier et al, 2015). Comme le Balbuzard, il prélève les poissons dans des eaux peu profondes après les avoir repérés en vol ou depuis un perchoir.

D’après une étude menée en Allemagne sur 5 couples de Pygargues, celui-ci capture de préférence la Brème et le Brochet et évite les Perches, les Gardons et les Anguilles. D’une manière générale, la taille de la proie semble décisive : les Pygargues préfèrent les poissons de 30-50 cm, ceux de plus de 50 cm n’étant pas consommés (Nadjafzadeh et al, 2015). Des travaux ont montré que le Pygargue à queue blanche adulte a besoin de 500 g de poisson ou 300 g de chair d’oiseau ou de mammifères quotidiennement ; les exigences quotidiennes des jeunes sont d’environ 800 g, essentiellement de poissons (Orabi, 2012).

Profil sur la tête d'un pygargue poussant des cris d'orfraie, le bec est grand ouvert..

Histoire en France

D’expression populaire à animal honni…

Si la littérature ornithologique Française fait finalement peu de place au pygargue à queue blanche. Il n’y a que très peu de gravures attestant de la présence des pygargues mais ceux-ci ont donné une expression populaire : « Pousser des cris d’Orfraies ». Cette expression vient des cris très aigus que poussent ces oiseaux au moment de la période de reproduction. L’Orfraie était le nom du pygargue à queue blanche au moyen âge. Peu d’animaux ont donné des expressions populaires: le loup, l’ours et donc le pygargue à queue blanche. Ce qui indique qu’il était forcément très présent dans le pays. Cela est confirmé par des auteurs qui affirment que les pygargues nichaient partout en France au 18ème siècle. Ensuite les persécutions ont fait décliner sa population de manière dramatique. Flourens cite une nidification dans la forêt de Chambord en 1780 puis Victor Fatio et Horace Bourdillon décrivent très précisément la dernière nidification en France continentale dans la forêt de Ripaille à Thonon les Bains (Haute-Savoie) en 1892. En Corse, l’oiseau a niché jusqu’à la fin des années 50, début des années 60.

2011 : Le retour naturel

En 2011 un couple vient s’installer naturellement en Lorraine et élève successivement ses nichées depuis. Il faudra attendre 2018 pour voir deux autres couples s’installer en Brenne et en Champagne. Un 4ème couple semble s’établir en 2020 entre la marne et la Meuse mais sans que l’aire ne soit trouvée. Le retour en « Patchwork » des pygargues sur le sol Français montre l’extrême fragilité de cette population et le projet d’un programme de réintroduction visant à renforcer cette dernière mais également à conquérir de nouveaux territoires s’impose rapidement comme une action nécessaire au retour pérenne de l’espèce sur le sol Français.

2022-2030 : Le programme de réintroduction

A partir de 2022, sur le site des aigles du Léman, sur la commune de Sciez, au bord du lac Léman se déroulera le programme de réintroduction des pygargues en France. 6 oiseaux seront d’abords réintroduits pour tester l’ensemble des éléments du programme (élevage, taquet parental, pose des balises, système de surveillance par caméras…) Si tout se passe bien, ce seront ensuite 80 oiseaux qui seront relâchés sur le bassin lémanique. L’objectif est de recréer une population de 3-4 couples sur le bassin lémanique et de commencer la colonisation du haut-Rhône, région ciblée comme prioritaire par le Plan National d’Action.